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Il y a un siècle, les astronomes pensaient que l'univers était infini
et éternel. En 1927, le prêtre belge Georges Lemaître conjectura, à partir des
équations de la théorie de la relativité générale, que l'univers pouvait avoir
un commencement, ce que l'on appela plus tard le Big Bang. Cette théorie reçut
un début de confirmation quand en 1929 Edwin Hubble observa que plus une
galaxie est éloignée de nous, plus son spectre dérive vers le rouge, ce qui
signifie (effet Doppler) qu'elle s'éloigne de nous.
Un autre changement majeur dans notre compréhension de l'univers intervint
dans les années 1960. Dès la fin du XIX
e siècle, Lord Kelvin avait
conjecturé, en observant la distribution des vitesses des étoiles, qu'il y
avait plus de matière dans notre galaxie que l'on ne pouvait en voir au
télescope, ce qui avait conduit Poincaré à parler de « matière noire » en
1906. Dans les années 1960, de nouvelles observations de la vitesse de
rotation des galaxies, grâce à de nouveaux moyens techniques, confirmèrent
l'intuition: la matière que l'on observe, c'est-à-dire les étoiles, ne
représente que 15% de la matière dans l'univers d'après les théories
actuelles. La matière noire, supposée combler le manque, n'a encore jamais été
observée, mais les recherches vont bon train.
Pire encore, dans les années 1990, de nouvelles observations conduisirent à
conjecturer que la matière ne représente que 32% de l'énergie dans l'univers,
le reste étant constitué d'« énergie noire ». Dans ces conditions, la matière
visible ne représenterait que 5% de l'énergie de l'univers. L'énergie noire
n'a jamais encore été observée directement.
En un siècle, les astronomes ont donc « égaré » 95% de l'énergie dans
l'univers. C'est embêtant, tout de même.
Mais peut-être l'énergie noire n'existe-t-elle tout simplement pas: c'est la
théorie que des chercheurs hongrois viennent de
publier. En effet, les équations de la relativité générale
sont particulièrement complexes mathématiquement, et jusqu'ici les astronomes
s'appuyaient, pour les mettre en œuvre, sur un modèle simple d'univers,
de densité constante. Or la répartition de la matière dans l'univers n'est pas
du tout constante puisque les galaxies se concentrent à la surface de sortes
de bulles gigantesques. Si l'on intègre cette répartition dans le modèle de
développement de l'univers depuis le Big Bang, la simulation numérique colle
parfaitement aux observations, sans introduire aucune énergie noire.
Des observations devront confirmer ou infirmer cette théorie; il serait
cocasse que l'énergie noire, qui occupe bien des astronomes depuis vingt ans,
n'ait été qu'un mirage résultant d'une approximation trop grossière.
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